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Context Cramming : quand trop d’information nuit à l’intelligence artificielle

21 octobre 2025

Avec l’arrivée de GPT-5 et de ses fenêtres de contexte élargies à des millions de tokens, une nouvelle ère s’ouvre pour les applications web et les usages de l’intelligence artificielle. Pouvoir charger d’un coup des milliers de pages de documentation, l’historique complet d’une relation client ou encore l’ensemble d’un projet logiciel semblait jusqu’ici impensable.

Naturellement, la tentation est grande pour les développeurs et les entreprises de “tout mettre” dans le modèle : textes bruts, bases de connaissances, logs, données utilisateurs… une pratique qu’on appelle désormais context cramming.

Mais plus de contexte ne signifie pas automatiquement plus d’intelligence. En réalité, ce réflexe peut nuire à la précision, à la performance et même à la sécurité des systèmes IA. Comprendre les limites du context cramming, c’est poser les bases d’une utilisation plus stratégique et durable de ces nouveaux outils.

Qu’est-ce que le context cramming ?

Le terme context cramming vient de l’anglais to cram, qui signifie « bourrer » ou « entasser » — comme un étudiant qui révise la veille d’un examen en essayant d’absorber un maximum d’informations sans réelle organisation.

Appliqué aux modèles de langage, le concept désigne le fait de remplir massivement la fenêtre de contexte d’un LLM avec tout ce qu’on a sous la main, sans distinction de pertinence ni hiérarchisation. Cela peut inclure :

  • des documents entiers copiés-collés,
  • des historiques de conversations complets,
  • des bases de données exportées en bloc,
  • ou encore des instructions techniques non filtrées.

En apparence, cette approche semble logique : plus le modèle a de données sous les yeux, plus il devrait être « intelligent ». Mais en pratique, c’est exactement l’inverse qui se produit : trop d’information brute entraîne du bruit, de la dilution et souvent une baisse de qualité dans les réponses.

Le context cramming est donc une forme d’optimisme naïf face à l’élargissement des fenêtres de contexte : une croyance que “plus” équivaut à “mieux”, alors que la valeur réside surtout dans la sélection et la structuration de l’information injectée.

Pourquoi ça pose problème ?

Si l’idée de donner un maximum d’information au modèle peut sembler séduisante, le context cramming entraîne en réalité plusieurs effets indésirables. De la dilution de l’information à la hausse des coûts, en passant par des risques de sécurité, cette pratique soulève différents enjeux qu’il est essentiel de comprendre.

1. Dilution de l’information clé
Quand on inonde le modèle de données, les éléments vraiment pertinents se retrouvent noyés dans la masse. Résultat : le LLM peine à hiérarchiser ce qui compte et fournit des réponses vagues, approximatives ou à côté de la plaque.

2. Effet d’amnésie
Même si les fenêtres de contexte s’élargissent, les modèles n’accordent pas le même poids à chaque token. Les informations placées loin au début du contexte ont tendance à perdre de l’influence, comme si elles « s’effaçaient » progressivement. Le cramming peut donc rendre certaines données cruciales invisibles pour le modèle.

3. Performance et coûts
Plus le contexte est grand, plus l’inférence est lente et plus la facture grimpe. Injecter des milliers de tokens inutiles revient à gaspiller des ressources, sans bénéfice tangible pour la qualité des réponses.

4. Risques de sécurité
Bourrer le contexte avec des exports complets (logs, données clients, documents internes) augmente mécaniquement les risques de fuite accidentelle. Une simple requête mal tournée peut révéler des informations sensibles qui n’auraient jamais dû se retrouver là.

En somme, le context cramming transforme une opportunité — les fenêtres de contexte élargies — en handicap. Il ne s’agit pas seulement d’une mauvaise pratique technique, mais d’un frein stratégique à l’adoption intelligente de l’IA.

Exemples concrets du context cramming

Le concept de context cramming peut sembler abstrait, mais on en fait déjà l’expérience au quotidien dans nos interactions avec ChatGPT ou d’autres assistants IA. 

Dans l’utilisation quotidienne de ChatGPT

  • Le message fleuve : vous copiez-collez plusieurs pages de texte d’un coup (par exemple un long document ou un cours complet) et demandez au modèle un résumé. Le résultat est souvent vague ou généraliste, car les points essentiels se sont dilués dans la masse.
  • La conversation sans fin : après des dizaines d’échanges, ChatGPT semble oublier certains détails du début. Vous devez répéter vos consignes ou reformuler — un signe que le modèle n’arrive pas à traiter efficacement tout l’historique.
  • La demande trop large : « voici tout mon plan d’affaires en 20 pages, écris-moi une stratégie marketing ». La réponse est souvent banale, car le modèle n’a pas “filtré” ce qui était vraiment pertinent dans ce flot d’informations.

Ces situations sont déjà une forme de context cramming : on met “trop” sans organiser, et la qualité de l’IA baisse.

Dans le développement et l’intégration de l’IA

Le même phénomène se produit lorsqu’on construit des applications plus techniques :

  • Un chatbot de support client qui reçoit tout l’historique des tickets et des conversations d’un utilisateur plutôt qu’un résumé ciblé → l’IA répond lentement, de manière confuse, et parfois à côté de la vraie demande.
  • Un assistant de documentation qui charge l’intégralité d’un manuel technique de 500 pages pour répondre à une question ponctuelle → la réponse devient générique, alors qu’un moteur de recherche intelligent aurait permis de cibler la bonne section.
  • Un outil de développement où l’on injecte la totalité d’un projet de code dans le contexte pour corriger un bug → non seulement la requête est coûteuse, mais le modèle a de fortes chances de se perdre au lieu de pointer vers l’erreur précise.

En résumé : que ce soit comme utilisateur grand public ou comme développeur, le context cramming conduit aux mêmes effets : confusion, lenteur, réponses trop vagues et gaspillage de ressources.

L’alternative : la discipline du contexte

Face aux limites du context cramming, une autre approche s’impose : celle de la discipline du contexte. L’idée n’est plus de tout mettre dans le modèle, mais de sélectionner intelligemment ce qui est réellement nécessaire à chaque interaction.

Cette discipline passe par plusieurs pratiques complémentaires :

  • Context curation / pruning / distillation : filtrer, élaguer et condenser l’information pour ne garder que l’essentiel.
  • RAG (Retrieval Augmented Generation) : utiliser un moteur de recherche vectoriel pour n’injecter que les documents pertinents à la question posée.
  • Résumé adaptatif : transformer des blocs de texte trop longs en synthèses plus légères avant de les transmettre au modèle.
  • Structuration du prompt : organiser l’information avec des titres, sections et balises pour aider l’IA à mieux comprendre et hiérarchiser ce qu’elle reçoit.

Chez Beet, nous intégrons déjà ces pratiques dans le développement de nos applications web. Plutôt que de céder à la facilité du “tout mettre”, nous mettons en place des systèmes qui optimisent l’usage des contextes élargis.

Pourquoi l’accompagnement fait toute la différence

En d’autres mots, l’agrandissement des fenêtres de contexte est une formidable opportunité, mais seule une approche disciplinée permet d’en tirer une valeur réelle. C’est précisément ce que nous mettons en œuvre chez Beet : transformer une contrainte technique en levier d’efficacité pour nos clients.

L’augmentation des fenêtres de contexte avec des modèles comme GPT-5 marque une avancée majeure pour l’IA. Mais comme souvent en technologie, la puissance brute n’est rien sans stratégie. Le context cramming illustre bien ce piège : croire qu’il suffit d’entasser des données pour obtenir de meilleurs résultats, alors qu’en réalité, c’est souvent l’inverse qui se produit.

Au-delà du simple développement technique, c’est tout un travail de conception et de stratégie qui doit être mené. Les organisations ont besoin d’être accompagnées pour mettre en place les bonnes pratiques : filtrer, résumer, structurer, hiérarchiser. Autrement dit, transformer l’abondance d’information en intelligence réellement exploitable.

Chez Beet, nous croyons que la valeur de l’IA ne réside pas seulement dans ce qu’elle peut faire, mais dans la façon dont elle est utilisée. Notre rôle est d’aider les entreprises à éviter la facilité trompeuse du “tout mettre” et à adopter des approches solides, sécuritaires et performantes. 

Parce qu’au final, c’est cette discipline qui fait la différence entre une IA qui impressionne… et une IA qui transforme réellement les organisations.

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